Philippe Fabry
Sur les troubles en Iran
Depuis quelques jours, de violentes manifestations se multiplient en Iran, motivées par la brutale augmentation des prix du carburant, dans un contexte économique déjà très difficile, tant du fait des sanctions économiques américaines que de la structure-même de l'économie de la République islamique, cette Union soviétique chiite. Les manifestants s'insurgent contre les énormes dépenses du régime pour s'imposer en Iran, en Syrie et défier Israël au Liban alors que la situation intérieure est déjà catastrophique et que, par-dessus le marché, la présence iranienne en Irak et au Liban a également provoqué des manifestations ces dernières semaines.

Capture d'écran du site https://liveuamap.com/ dont je conseille la visite
Loin de moi l'idée de faire une analyse détaillée de la situation, je formulerai seulement quelques remarques exposant pourquoi, à mon sens, ce mouvement de révolte ne donnera rien en Iran.
Un régime autoritaire ne peut s'effondrer que s'il perd la menace de la force armée.
Il ne peut perdre celle-ci que dans trois cas.
Le premier cas est celui d'une intervention étrangère qui détruit la force armée du régime. Cela pourrait arriver en cas d'intervention américaine, mais celle-ci est très improbable.
Le deuxième cas est celui du refus par le régime de l'emploi de la répression. Ce fut le cas de Gorbatchev, et qui permit les révolutions dans les pays du Pacte de Varsovie. Tant que Khamenei est le Guide Suprême, une telle attitude est impensable, et la volonté de recourir à la répression féroce sera là.
Le troisième cas est purement et simplement le cas où la force armée se détourne du régime, soit en se déclarant neutre, soit en ralliant les révoltés, ce que l'on a vu par exemple en Tunisie ou en Egypte lors du Printemps arabe.
Ce scénario est peu vraisemblable en Iran, car même si l'armée régulière était tentée de faire ainsi, le régime peut compter sur les Gardiens de la Révolution, qui sont un corps d'élite, représentent presque la moitié de l'effectif total et qui ont le contrôle des armes les plus puissantes du régime (les régiments de missiles, notamment). Tout au plus pourrait-il y avoir un scénario à la syrienne dans lequel les forces armées se scindent en deux camps et plongent le pays dans la guerre civile, devenant un théâtre d'affrontement entre grandes puissances, par procuration. Mais en Syrie, cet éclatement a été favorisé par la différence confessionnelle, qui n'existe pas à ce degré en Iran.
Le scénario le plus vraisemblable est donc un écrasement des révoltes, et probablement un contrôle encore accru des Gardiens de la Révolution sur le pays. De nouvelles provocations contre l'étranger proche, Arabie Saoudite notamment, pourraient avoir lieu pour tenter de ressouder le pays par la peur, une manoeuvre répétée de plus en plus fréquemment ces derniers mois.